Il y a des quartiers qu’on traverse.
Et puis il y a ceux qu’on savoure, au rythme des pas, des vitrines et des souvenirs qu’on imagine. Saint-Germain-des-Prés fait clairement partie de cette deuxième catégorie.
Entre église millénaire, cafés mythiques, ruelles pleines de charme, boutiques élégantes et jardins où l’on respire enfin, ce “village” du 6ᵉ arrondissement a tout pour une journée à la fois culturelle, gourmande et poétique.
Je te propose une vraie balade, à faire à pied, en prenant ton temps. On commence sous la silhouette de l’église, on termine au Luxembourg, en passant par quelques adresses cultes… et d’autres plus discrètes, mais tout aussi savoureuses.
Sommaire
Toggle1. L’église Saint-Germain-des-Prés, le point de départ
À peine sorti du métro Saint-Germain-des-Prés, elle est là, juste en face de toi : la majestueuse église Saint-Germain-des-Prés, qui domine la place. Impossible de la manquer, et c’est tant mieux, car c’est l’un des monuments les plus anciens de Paris.
Une abbaye millénaire au cœur du 6ᵉ
Fondée au VIᵉ siècle, l’abbaye Saint-Germain-des-Prés a vu défiler :
- les rois mérovingiens (elle fut même nécropole royale avant Saint-Denis),
- les attaques vikings, qui l’incendièrent,
- les grands bouleversements de Paris au fil des siècles.
Au XIXᵉ siècle, elle est restaurée par les architectes Godde et Baltard. C’est à ce dernier qu’on doit ces superbes fresques et tableaux qui tapissent l’intérieur.
Un détail à ne pas rater :
La nef est l’un des derniers grands témoignages de l’art roman à Paris.
Prends le temps d’entrer, de t’asseoir quelques minutes et de lever les yeux : on est en pleine ville, mais la parenthèse est totale.
Adresse : 3 place Saint-Germain-des-Prés, Paris 6ᵉ.
2. Les cafés littéraires : Flore, Deux Magots et Brasserie Lipp
En sortant de l’église, tu n’as que quelques pas à faire pour changer d’époque. Place et boulevard Saint-Germain, trois cafés se partagent un morceau d’histoire littéraire et artistique : Les Deux Magots, le Café de Flore et la Brasserie Lipp.
Là où les idées s’écrivaient sur des serviettes en papier
Au XXᵉ siècle, on y croise :
- Jean-Paul Sartre,
- Simone de Beauvoir,
- Boris Vian,
- Guillaume Apollinaire,
- Albert Camus,
- Pablo Picasso,
et toute une génération d’écrivains, artistes, musiciens et intellectuels qui viennent y chercher un peu de chaleur, de café, et d’inspiration.
Aujourd’hui, ces adresses ont gardé leur aura :
- Le Café de Flore avec sa façade presque iconique.
- Les Deux Magots, avec sa terrasse qui regarde l’église.
- La Brasserie Lipp, classée monument historique, avec ses mosaïques et fresques.
Chacune a même créé son propre prix littéraire, comme un clin d’œil à son histoire.
N’hésite pas à pousser la porte, même pour un simple café : c’est un peu cher, oui, mais tu t’offres un morceau de patrimoine, pas juste une boisson.
Quelques repères :
- Café de Flore – 172 boulevard Saint-Germain, Paris 6ᵉ
- Les Deux Magots – 6 place Saint-Germain-des-Prés, Paris 6ᵉ
- Brasserie Lipp – 151 boulevard Saint-Germain, Paris 6ᵉ
Profites-en pour flâner sur le boulevard Saint-Germain, connu pour ses jolies boutiques de mode et ses vitrines soignées.
3. La place de Fürstenberg et le musée Eugène-Delacroix
On quitte un peu le boulevard pour retrouver une ambiance plus intimiste. Remonte vers la rue Jacob, jalonnée de librairies et de galeries d’art. C’est un peu le fil rouge culturel du quartier.
Au détour, prends à droite rue de Fürstenberg. Là, tu tombes sur une toute petite place, presque cachée : la place de Fürstenberg.
Une des places les plus charmantes de Paris
Ce qui frappe :
- un seul réverbère à cinq globes au centre,
- quatre grands paulownias qui veillent comme des gardiens,
- de belles façades sages et harmonieuses.
L’endroit a gardé quelque chose de l’ancienne abbaye dont il dépendait, mais avec un charme de village chic en plein Paris.
Juste là se trouve le musée national Eugène-Delacroix, installé dans les anciens appartements et l’atelier du peintre. On y découvre :
- ses tableaux,
- des œuvres plus intimes,
- des lettres, des photographies,
- et un joli jardin intérieur, paisible, presque hors du temps.
Musée national Eugène-Delacroix – 6 rue de Fürstenberg, Paris 6ᵉ.
4. La Monnaie de Paris : quand l’argent devient patrimoine
Depuis la place de Fürstenberg, retrouve la rue Jacob, puis file vers les rues Jacques Callot et Guénégaud pour rejoindre le quai de Conti. Sur ta gauche, un grand bâtiment néoclassique t’attend : la Monnaie de Paris.
La plus vieille “entreprise” du monde
Son activité remonte à 864. Elle ne s’est installée sur le quai qu’en 1775, dans ce bâtiment de 120 mètres de long, orné de statues et d’une façade très solennelle.
Après une rénovation en 2017, la Monnaie de Paris a ouvert un musée moderne, qui te fait entrer dans les coulisses de la fabrication des pièces :
- fonte des métaux (or, argent, bronze, etc.),
- gravure,
- frappe des pièces.
Même sans faire toute la visite, la boutique permet déjà d’admirer quelques très beaux exemplaires.
Côté gourmandises, l’adresse est aussi réputée :
- le restaurant Guy Savoy (3 étoiles, à réserver en amont),
- le café Frappé by Bloom, pour une pause plus simple dans la cour.
En sortant, prends quelques minutes pour admirer la vue sur l’île de la Cité et le square du Vert-Galant, de l’autre côté de la Seine.
Monnaie de Paris – 2 bis rue Guénégaud, Paris 6ᵉ.
5. L’Institut de France, gardien des lettres et des sciences
En continuant sur le quai de Conti, tu arrives au numéro 23 : c’est l’Institut de France.
Sous la coupole, cinq académies prestigieuses
L’Institut de France se décrit lui-même comme le “Protecteur des arts, des lettres et des sciences”.
Il regroupe cinq académies, dont la plus connue est l’Académie française, fondée en 1635.
Sa coupole, reconnaissable entre mille, est visible depuis de nombreux spots parisiens.
Si tu en as la possibilité, fais un tour à la bibliothèque Mazarine, la plus ancienne bibliothèque publique de Paris. C’est un endroit calme, studieux, avec ce parfum de livres anciens qu’on reconnaît entre tous.
Institut de France – 23 quai de Conti, Paris 6ᵉ.
6. Le pont des Arts : carte postale vivante
Face à l’Institut, un passage presque obligé : le pont des Arts. Cette passerelle en fonte, légère et piétonne, est un décor de cinéma à ciel ouvert.
Un pont de photographes, d’artistes et d’amoureux
Depuis sa construction en 1800, le pont des Arts est plus qu’un simple lien entre deux rives :
- l’été, on y pique-nique,
- des peintres installent leurs chevalets,
- des musiciens s’y produisent,
- et des groupes d’amis y refont le monde, avec la Seine en toile de fond.
Longtemps, il a été surnommé le pont des amoureux. Les couples accrochaient des cadenas sur les parapets pour symboliser leur amour. Le poids devenant dangereux pour la structure, cette pratique a dû être interdite en 2015.
Au bout du pont, côté rive droite, tu arrives au Louvre. Côté rive gauche, tu restes dans le 6ᵉ et tu poursuis ta balade le long du quai.
Pont des Arts – entre le quai de Conti et le quai François-Mitterrand.
7. L’École nationale supérieure des Beaux-Arts
Après avoir profité de la vue, reviens sur le quai de Conti, puis remonte vers la rue Bonaparte. Là, une façade ornée de fresques et de bustes attire l’œil : c’est l’École nationale supérieure des Beaux-Arts.
Un haut lieu de création
Réputée dans le monde entier, l’école forme depuis des générations des artistes dans toutes les disciplines.
Le site s’étend sur environ deux hectares et mêle plusieurs bâtiments, cours et espaces plus intimes.
Parmi les lieux à ne pas manquer :
- la cour d’honneur,
- la chapelle des Petits-Augustins,
- la cour du Mûrier,
- le Palais des Études et sa cour intérieure.
Petite anecdote : Auguste Rodin a échoué trois fois au concours d’entrée. Il réussit les épreuves de dessin, mais fut recalé… à cause de la sculpture.
École nationale supérieure des Beaux-Arts – 14 rue Bonaparte, Paris 6ᵉ.
8. La Maison de Serge Gainsbourg
Depuis les Beaux-Arts, reprends la rue Jacob, puis tourne à droite dans la rue des Saints-Pères. Un peu plus loin, à gauche, la rue de Verneuil. C’est là que les choses deviennent plus intimes : au 5 bis, la façade couverte de graffitis colorés attire immédiatement le regard.
Tu es devant la Maison Gainsbourg.
Un lieu de culte pour les fans
Cet hôtel particulier de 135 m² est resté figé dans l’état à la disparition de Serge Gainsbourg, à l’intérieur comme à l’extérieur. Les fans du monde entier viennent s’y recueillir, déposer un mot, dessiner, écrire un titre de chanson sur le mur.
Même sans entrer, on ressent quelque chose de très particulier : on se surprend à fredonner une chanson, à imaginer la vie à l’intérieur, les nuits de travail, les improvisations au piano.
Maison Gainsbourg – 5 bis rue de Verneuil, Paris 7ᵉ.
9. Le Bon Marché Rive Gauche et la Grande Épicerie de Paris
Au bout de la rue de Verneuil, redescends la rue du Bac : au fil des façades, tu rejoins l’un des temples historiques du shopping parisien, le Bon Marché Rive Gauche.
Du petit commerce au grand magasin iconique
À son origine, en 1838, ce n’est qu’une modeste mercerie de quartier. Aujourd’hui, c’est l’un des grands magasins les plus élégants de Paris, connu pour :
- ses sélections pointues de marques,
- ses expositions éphémères,
- son ambiance à la fois chic et chaleureuse.
Juste à côté, un paradis pour les gourmets : la Grande Épicerie de Paris. On y trouve :
- produits d’exception,
- spécialités du monde entier,
- ingrédients rares,
- beaux rayons de boulangerie, pâtisserie, épicerie fine.
C’est le genre d’endroit où l’on peut passer une heure à simplement regarder, sentir, imaginer des recettes.
Bon Marché Rive Gauche – 24 rue de Sèvres, Paris 7ᵉ
La Grande Épicerie de Paris – 38 rue de Sèvres, Paris 7ᵉ.
10. L’église Saint-Sulpice, mystères et lumière
En remontant la rue de Sèvres jusqu’à la rue du Vieux-Colombier, tu arrives face à l’église Saint-Sulpice.
Une église au cœur des intrigues
Saint-Sulpice a gagné une notoriété mondiale avec “Da Vinci Code” de Dan Brown, qui en a fait un élément clé de son intrigue.
Au-delà de la fiction, l’église abrite un instrument fascinant : un gnomon, sorte de cadran astronomique géant.
Le principe :
- une lentille laisse entrer un rayon de lumière,
- ce rayon se déplace sur le sol et un obélisque,
- le tout permet de déterminer les dates des solstices et des équinoxes.
Pas besoin d’être passionné d’astronomie pour rester impressionné par ce mélange de science, de foi et d’architecture.
Église Saint-Sulpice – 2 rue Palatine, Paris 6ᵉ.
11. L’Odéon et la mémoire des révolutions
Avant de filer vers le jardin, fais un détour par la place Henri-Mondor. Au milieu, une statue de Danton rappelle qu’il vivait dans le quartier.
Juste à côté, la cour du Commerce Saint-André : une petite cour pavée, pleine de charme, où se trouve Le Procope, le plus vieux café de Paris. Danton, Marat et d’autres révolutionnaires y avaient leurs habitudes. C’est également ici qu’aurait été présenté pour la première fois le fameux bonnet phrygien.
En remontant la rue de l’Odéon, tu arrives devant l’Odéon – théâtre de l’Europe.
Un théâtre chargé d’histoires
Ce théâtre à l’italienne, à la façade néoclassique, est aujourd’hui classé monument historique.
Construit en 1782, il a :
- été incendié à deux reprises,
- été occupé en mai 68,
- accueilli des pièces majeures du répertoire.
C’est ici qu’a eu lieu, en 1784, la première représentation du Mariage de Figaro de Beaumarchais, après plusieurs années de censure.
Odéon – théâtre de l’Europe – Place de l’Odéon, Paris 6ᵉ.
12. Le jardin et le musée du Luxembourg : la pause finale
À quelques minutes à pied de l’Odéon, tu débouches sur l’un des jardins les plus aimés des Parisiens : le jardin du Luxembourg.
Le “Luco”, le jardin dont on ne se lasse pas
Le palais du Luxembourg abrite le Sénat, mais c’est surtout le jardin qui attire les promeneurs, joggeurs, familles, lecteurs, étudiants…
On y trouve :
- un grand bassin où les enfants font voguer de petits bateaux,
- des serres avec une collection d’orchidées précieuses,
- un rucher,
- un verger,
- des aires de jeux,
- des allées ombragées pour flâner.
Cherche la fontaine Médicis, un peu cachée, très romantique, enfouie dans la verdure. Tout au long de la promenade, statues et œuvres ponctuent le paysage.
Installe-toi sur une chaise verte, prends le temps. C’est la fin idéale de cette balade germano-parisienne.
Juste à côté, le musée du Luxembourg ajoute une note culturelle : c’est le premier musée ouvert au public en France, dès 1750. Aujourd’hui, il accueille des expositions temporaires soigneusement choisies.
Jardin du Luxembourg – Rue de Médicis / Rue de Vaugirard, Paris 6ᵉ
Musée du Luxembourg – 19 rue de Vaugirard, Paris 6ᵉ.
Saint-Germain-des-Prés, c’est ce rare mélange de patrimoine, cafés, librairies, jardins, gourmandise et esprit intellectuel. Une balade suffit à comprendre pourquoi ce quartier fait rêver le monde entier… et pourquoi les Parisiens eux-mêmes y reviennent encore et encore, dès qu’ils ont besoin d’air, de beauté, ou simplement d’un bon café en terrasse.